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Hard du Hard • Technologies de Mémoires — partie 1/3

Stockage sur film et stockage magnétique

En 1839, Louis Daguerre a créé le daguerréotype, une méthode de capture d'une image sur une feuille de métal poli à l'aide de produits chimiques. C'est le début de la photographie, littéralement « Écrire avec la lumière ». En 1894, les frères Lumière créent le Cinématographe, un appareil capable d'écrire et de lire un film photographique – de capturer puis de le projeter avec le même appareil.

Un véritable stockage de mémoire, tout-en-un. Le film photographique est ainsi devenu un support de stockage de données majeur. Une des spécificités du stockage photographique est de pouvoir utiliser des objectifs optiques pour miniaturiser les clichés et agrandir les images. Ainsi, une image projetée sur un écran de cinéma est stockée sur un film de 35 millimètres de large. Son agrandissement est ensuite réalisé par un jeu de lentilles d’optique classique. Le film photographique microforme – souvent appelé microfilm dans les films d'espionnage – devient un moyen de stocker des plans, des textes ou des photographies de documents originaux sur un film, réduits à 4% de leur taille d'origine.

 

microformUn microfilm (ou microform) ©TWU Library

 

Même les premiers codes informatiques étaient mis sur microfilm pour être distribués : les acheteurs devaient projeter le film, puis taper le tout à la main. Le stockage photographique est encore utilisé aujourd'hui : la conservation des films se fait avec un film photographique 35 mm, et le film IMAX 70 mm est une méthode courante de distribution de films grand public.

 

depart imageQuelques secondes de bobine de cinéma 28 mm

 

Une projection IMAX a une résolution équivalente à 12000 x 8700 pixels, ce qui correspondrait à environ 120 Gbps de flux de données. Cependant, 90 minutes de projection de film (600 térabits de données) nécessitent 22 km de film. Une bobine de film IMAX pèse 200 kg et mesure jusqu'à 1,8 mètre de diamètre ; un projecteur pèse 2 tonnes et nécessite une alimentation de taille industrielle. Ce n'est pas une solution de stockage et de transfert de données viable dans la plupart des cas. Même pour du 28mm, il faut plusieurs bobines et un plateau massif pour pouvoir projeter un film en une fois.

 

plateauxDes plateaux déroulants de cinéma. Un plateau permet de passer un film d'une heure et demie sans interruption.

 

Le stockage photographique est donc intéressant pour sa densité de données, mais il nécessite des processus chimiques longs et complexes, et la sortie n’est pas directement lisible par un ordinateur. Parallèlement au stockage photographique, les progrès de la recherche sur les composés métalliques ont permis de déposer une couche de matériau magnétique sur des pellicules celluloïd. Si vous appliquez un champ magnétique important au matériau (généralement avec un électroaimant), vous modifierez son orientation magnétique.

Cette orientation magnétique peut être mesurée à l'aide du même électroaimant. Cela permet d'écrire et de lire des données avec le même circuit. Initialement utilisée pour le stockage de données analogiques – en particulier audio et vidéo, la bande magnétique a également été utilisée pour le stockage de données numériques. Plusieurs formats de bande magnétique existaient, car les fabricants ajoutaient des cartouches et des bobines autour des bandes. La Compact Cassette pour la musique, la Betacam, DV ou VHS pour la vidéo et les cartouches quart de pouce ou Linear Tape-Open pour les données.

 

k7Une cassette à bande magnétique

 

Le stockage magnétique existe également sous forme de disque. Disque recouvert d'un matériau magnétique, la disquette est apparue dans les années 1970 et est devenue obsolète au cours des années 2000 (sauf dans l’enseignement supérieur et la recherche en France..).

 

disquetteLa disquette 3 pouces 1/2 et son lecteur (qui fait des bruits chelous)

 

La disquette représente la plupart des avantages et des inconvénients du stockage sur bande magnétique : bon marché, facile à utiliser, facilement réinscriptible, totalement adapté aux données numériques et à la compatibilité informatique, mais avec une faible capacité. Le stockage magnétique des données existe toujours : les disques durs ne sont toujours pas obsolètes, même si leurs ventes sont désormais inférieures aux disques SSD qui utilisent de la mémoire flash.

 

Composés de nombreux disques magnétiques avec un moteur et une tête de lecture/écriture, ils utilisent l'effet de magnétorésistance géante pour lire et écrire le matériau magnétique avec une densité de données beaucoup plus élevée. Le dit effet, ou GMR, est un effet de mécanique quantique découvert par l’équipe d’Albert Fert, physicien français. C’est un effet qui a lieu dans certains empilements de couches fines de conducteurs magnétiques.

 

gmr stackEmpilement type pour mémoire de magnétorésistance géante (GMR)

 

Le film magnétique fixe va avoir tous les électrons de sa couche de conduction du même spin. De par la règle d’exclusion de Pauli, les électrons qui tenteront de passer par cette couche ne pourront qu’être de spin opposé. Cette couche servira donc de filtre à électrons. En dessous, la couche magnétique variable servira à enregistrer les données.

Si l’orientation magnétique de la couche variable est du même sens que celle de la couche fixe, alors les électrons pourront passer. Cependant, si aujourd’hui les mémoires de nos appareils électroniques sont aussi rapides et capacitaires, ce n’est pas grâce à la GMR. Dans le prochain article, nous parlerons de technologie silicium. Restez branchés !

 

éléctron de spin

Mécanisme de filtration des électrons par valve de spin

 

À l’inverse, si l’orientation est inverse donc, les électrons (tous du même spin) seront bloqués toujours selon la règle d’exclusion de Pauli. La résistance de ce film magnétique sera « géante ». Cette méthode permet de faire des domaines magnétiques bien plus petits, mais de pouvoir les lire aussi facilement, donc un stockage des données bien plus denses. Pourtant, avec leurs pièces mobiles mécaniques, ces disques sont relativement grands et fragiles, pas vraiment adaptés à l'électronique mobile – ou quoi que ce soit de plus petit qu'un ordinateur portable, réellement. Mais ils sont encore massivement utilisés dans les applications fixes où leur faible vitesse d'accès n'est pas un problème.

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par Jemporte, le Mercredi 31 Mai 2023 à 19h18  
Au sujet du disque Laser video qui a existé et qui a aussi donné des lecteurs data laser grand format (disque laser 30cm comme les vinyle), il y a eu 2 concurrents :
- le disque RCA à microsillon (carrément) mais avec une grosse densité et des données vidéo analogiques.
- le Laserdisc cité plus haut, de Philips/Thomson/Matsushita, analogique aussi (numérique pour le son)
- de mémoire : une autre standard disque capacitif (comme le RCA) mais sans micro-sillon mais une tête mécanique qui se balade en surface librement et permet donc une lecture séquentielle. Standard japonais, il me semble me rappeler par Epson. Une disque plus petit, de mémoire, de 20 ou 25cm.
Des trois seul le Laserdisc a survécu en tant que lecteur semi-pro élitiste.
Le troisième standard n'a jamais vraiment été lancé et celui de RCA a connu un succès relatif et éphémère.

Si RCA a tué son standard au milieu des années 80, le Laserdics a perduré et son support avec des nouveaux titres qui sortaient a duré beaucoup plus longtemps, et a franchi le cap de l'an 2000.
Le format CD repose sur le format hardware du Laserdisc. Il y a même des CD Audio avec une partie Laserdisc pour afficher un titre en clip vidéo sous format Laserdisc (analogique et lisible par lecteur Laserdisc uniquement) et non CD Video (numérique et sous format mpeg 1 apparu début des années 90) et lisible par tout ce qui traine comme lecteur numérique du format CD au Blue Ray.
par Jemporte, le Mercredi 31 Mai 2023 à 18h17  
Tiens, je pensais que pour le film standard c'était du 35mm, d'où d'ailleurs sort le fameux 24x36, pellicule de film de ciné, repris par Leica qui en a fait un film photo (avant ça on était sur le fameux 6x6 du format 120). Donc 35mm de largeur perforations comprises. Ca laisse une image de 22mm de large avec un bande son optique latérale contrairement à la photo qui utilise l'image en long, d'où le 24mm en haut (sans piste son) et le 36 en large. Ce format avec cette orientation a aussi été utilisée dans le cinéma pour certains procédés.

Concernant les bandes magnétiques, sous PC on a eu les standards très courants, QIC/QIC TRAVAN, 8mm issu des bandes vidéo et DAT issus des lecteurs audio. Ces standards ont pouvait couramment les trouver même chez des particuliers. Le QIC, notamment, précède les sauvegarde CDR apparues quelques années après et à des prix beaucoup plus élevés au départ pour le procédé laser. Un lecteur QIC-80 coûtait un poil plus que le lecteur disquette standard, autant dire pas grand chose, mais se raccordait au même port FDD assez lent même pour l'époque, face à l'IDE. Les premières cassettes avaient 40 ou 80Go, poussées à 120Mo, puis des cassette Ex sont apparues avec 400Mo, soit plus que les disques durs de l'époque. Un format QIC Travan, plus tardif, doublait ces capacités.

Le standard bande le plus abouti aujourd'hui, c'est le LTO et on peut y sauvegarder un disque dur des plus grosses capacités produites, avec une fiabilité sur la durée garantie incomparable, pour à peu près la moitié du prix du disque en question. Ca implique le matériel de lecture/écriture à ajouter (dans les 5000 euros le lecteur 5.25 LTO-9 lisant les bandes haute densité 18To), soit 3 RTX 4090, et le temps de sauvegarde quand même. Un intérêt qui donne à réfléchir.
par Reflections, le Vendredi 26 Mai 2023 à 17h53  
par Pascal M., le Vendredi 26 Mai 2023 à 06h57  
par Arkane le Jeudi 25 Mai 2023 à 21h21
Super intéressant, hâte de lire la suite !

Petite remarque cependant, l'usage du mot « disque » devant « SSD » (pages 1 et 3) me fait tiquer : un SSD n'est pas un disque.
disque, lecteur, unité... on est tout à fait dans le langage
par Arkane, le Jeudi 25 Mai 2023 à 21h21  
Super intéressant, hâte de lire la suite !

Petite remarque cependant, l'usage du mot « disque » devant « SSD » (pages 1 et 3) me fait tiquer : un SSD n'est pas un disque.
par Un passionné de JV, le Jeudi 25 Mai 2023 à 16h49  
Intéressant très bonne la première partie
par N3cR0n0M1k0V, le Jeudi 25 Mai 2023 à 14h44  
par Un ragoteur antédiluvien en Nouvelle-Aquitaine le Jeudi 25 Mai 2023 à 08h28
Ce n'est pas du ruban perforé, non...
Pourquoi pas, là on rentre quand même dans de la subtilité ++, le principe de perforer un truc pour y conserver une information. Le seul équipement que j'ai vu fonctionner de la sorte était un Telex et cela remonte à mon enfance. Merci pour la précision sur l'encodage cependant.
par Baptiste B., le Jeudi 25 Mai 2023 à 12h53  
par N3cR0n0M1k0V le Mercredi 24 Mai 2023 à 06h50
Article intéressant et belle rétrospective

Néanmoins page 2 : Les disques vinyle sont eux toujours utilisés par les passionnés pour les enregistrements de musique analogique.
De mon expérience ce serait plutôt : "enregistrements analogique de musique" , en musique électronique (source électronique, résultat analogique) les vieux DJ mixent toujours avec des vinyles.

Vivement la suite en tout cas!
Parfaitement vrai, je modifie la formulation !
par Un ragoteur antédiluvien en Nouvelle-Aquitaine, le Jeudi 25 Mai 2023 à 08h28  
par N3cR0n0M1k0V le Jeudi 25 Mai 2023 à 06h12
Hum, tout le début de la page 2 avec le métier Jacquard et le Harvard Mark 1 c'est du papier perforé
Ce n'est pas du ruban perforé, non. Ce n'est pas la même utilisation non plus, hein, car le ruban perforé (encodage Baudot) est bel et bien destiné à la mémorisation de données utilisées dans des équipements informatiques (y compris les équipements de chiffrement modernes), au contraire des bandes et cartes perforées, qui eux, sont utilisés pour stocker des programmes pour les machines mécaniques ou électromécaniques (métiers Jacquard), ou les ordinateurs antédiluviens (encore plus antédiluviens que moi, quoiqu'ils existaient encore dans ma jeunesse).
par N3cR0n0M1k0V, le Jeudi 25 Mai 2023 à 06h12  
par Un ragoteur antédiluvien en Nouvelle-Aquitaine le Mercredi 24 Mai 2023 à 07h17
Côté rétrospective, il manque au moins les rubans de papier perforés, qui sont d'ailleurs toujours utilisés de nos jours dans les armées du monde entier...
Hum, tout le début de la page 2 avec le métier Jacquard et le Harvard Mark 1 c'est du papier perforé, c'est même indiqué dans l'article Wikipedia que tu cites.
par Un ragoteur antédiluvien en Nouvelle-Aquitaine, le Mercredi 24 Mai 2023 à 07h17  
par N3cR0n0M1k0V le Mercredi 24 Mai 2023 à 06h50
Article intéressant et belle rétrospective
Côté rétrospective, il manque au moins les rubans de papier perforés, qui sont d'ailleurs toujours utilisés de nos jours dans les armées du monde entier, surtout pour les équipements de chiffrement (souvent incorrectement qualifiées de "cryptographiques", alors que la cryptographie concerne uniquement le cassage du chiffre et de codes dont on ne possède pas les clefs): ils servent en particulier pour diffuser, stocker et entrer les clefs (symétriques, i.e. quasi incassables) de ces équipements (en plus, ces rubans sont faciles à détruire une fois utilisés, ou en cas d'urgence), ainsi que pour les téléimprimeurs de sur-chiffrement hors ligne (pas question que ceux-ci soient reliés, même par un simple port série, à un autre équipement) utilisés pour les messages très secrets.
par N3cR0n0M1k0V, le Mercredi 24 Mai 2023 à 06h50  
Article intéressant et belle rétrospective

Néanmoins page 2 : Les disques vinyle sont eux toujours utilisés par les passionnés pour les enregistrements de musique analogique.
De mon expérience ce serait plutôt : "enregistrements analogique de musique" , en musique électronique (source électronique, résultat analogique) les vieux DJ mixent toujours avec des vinyles.

Vivement la suite en tout cas!